Ce mois-ci, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a rendu deux décisions en l’espace de deux jours dans lesquelles elle fournit des précisions sur la certification des actions collectives dans la province : RateMDs Inc. v. Bleuler1 et Syngenta AG v. Van Wijngaarden2. Lus conjointement, ces arrêts démontrent que la Cour continue de mettre l’accent sur l’obligation qu’a le demandeur de prouver qu’il remplit les conditions de certification – l’existence d’une cause d’action viable et la présence de questions communes – avant qu’une action ne puisse être certifiée. De plus, la Cour précise que les éléments de preuve présentés par un demandeur pour établir l’existence d’un « certain fondement factuel » donnant ouverture à la certification doivent satisfaire aux critères d’admissibilité habituels, et décourage la pratique consistant à joindre à l’affidavit d’un professionnel du droit de nombreux documents qui constituent du ouï-dire et qui sont non identifiés, non authentifiés et accessibles au public.
Dans l’arrêt RateMDs, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique accueille l’appel des défenderesses et annule la certification d’une action collective proposée au nom de professionnels de la santé dont certains renseignements figuraient sur le site RateMDs.com, notamment leur nom, les cotes leur étant attribuées et des avis les concernant. La demanderesse faisait valoir qu’un délit découlant de la violation de la législation provinciale sur la protection des renseignements personnels avait été commis.
La Cour d’appel conclut que la demanderesse n’a pas démontré l’existence d’une cause d’action viable. Ses prétentions, bien que nouvelles, ne pouvaient être accueillies :
Dans l’arrêt Syngenta, la Cour d’appel accueille, en partie, l’appel d’une ordonnance certifiant une action collective introduite au nom de personnes exposées à des herbicides contenant du paraquat. Les demanderesses alléguaient que l’exposition au paraquat augmentait le risque d’avoir la maladie de Parkinson. La demande était fondée sur la négligence, les actes de violence et l’enrichissement injustifié.
La Cour conclut que la demande pour acte de violence ne pouvait être certifiée. S’appuyant sur les affaires DeBlock v. Monsanto Canada ULC3 (une décision dans laquelle Torys représentait les défenderesses) et Palmer v. Teva Canada Limited4 (lire notre bulletin sur cette affaire), elle statue qu’une exposition alléguée à un produit est insuffisante pour satisfaire à l’exigence de contact direct applicable aux actes de violence.
De plus, la Cour rejette les questions communes relatives aux différentes réparations pour les raisons suivantes :
Dans ses motifs, la Cour critique une tactique couramment employée par les demandeurs : la présentation de centaines ou de milliers de pages de documents trouvés en ligne (en l’occurrence, des documents judiciaires américains, des articles de presse, des études scientifiques, des pages Web et des publicités) annexés à des affidavits d’avocats ou de parajuristes. La Cour est d’avis que cette stratégie viole les principes de la preuve.
Ensemble, les arrêts RateMD et Syngenta établissent deux points importants en ce qui concerne a) la fonction de contrôle des critères de certification et b) les règles de preuve applicables aux dossiers de certification.
RateMD et Syngenta renforcent le rôle des critères de certification, qui constituent le seuil à franchir pour la certification. La Cour d’appel rappelle aux juges saisis des requêtes qu’ils jouent un rôle de contrôle important en s’assurant que seules les demandes liées à l’intérêt commun des membres du groupe sont présentées. Les tribunaux doivent examiner rigoureusement si un demandeur a rempli chacun des critères de certification, même si les demandes sont nouvelles ou complexes. Les plaidoiries qui n’ont aucune chance raisonnable de réussir, c’est-à-dire les demandes qui ne sont pas suffisamment fondées en droit ou en fait, doivent être rejetées à un stade préliminaire.
Ce degré d’examen s’étend également au critère des questions communes. Les questions communes proposées qui dépendent en grande partie d’évaluations individuelles, comme celles du lien de causalité ou des circonstances individuelles, ne peuvent pas être tranchées à l’échelle de l’action collective et ne doivent pas être certifiées. C’est notamment le cas pour les dommages-intérêts compensatoires et majorés ainsi que pour le recouvrement des frais de santé.
Une demande de certification en Colombie-Britannique doit être étayée par une preuve par affidavit qui démontre qu’il existe un « certain fondement factuel » en lien avec le critère des questions communes. L’arrêt Syngenta resserre les paramètres relatifs au type de preuve que les parties peuvent présenter dans le cadre d’une demande de certification :
Les personnes qui doivent se défendre contre une demande de certification doivent évaluer attentivement le dossier du demandeur et envisager leur stratégie sous les angles suivants :
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