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Puisque beaucoup de recours en responsabilité du fait des produits au Canada sont intentés sous forme d’action collective, les défendeurs tiennent souvent compte seulement de la moitié de l’analyse de la causalité – la causalité générale – dans le contexte de la norme de preuve peu élevée en matière de certification (soit qu’il existe « des éléments de preuve »). Cela peut créer la fausse impression qu’il incombe au défendeur d’établir le lien de causalité.
Deux développements importants qui ont eu lieu en 2021 concernant le préjudice qui aurait été causé par la vaccination, soit une décision de la Cour d’appel de l’Ontario et l’introduction d’un régime sans égard à la faute pancanadien, rappellent qu’en ce qui concerne les recours en responsabilité du fait des produits, la preuve du lien de causalité est complexe et continue à être soumise à des critères stricts au Canada.
Dans l’affaire Adam v. Ledesma-Cadhit1, la Cour d’appel de l’Ontario a maintenu une décision rejetant un recours alléguant que le décès d’un enfant aurait été causé par un vaccin contre la grippe H1N1, aussi connue comme la grippe porcine2.
Les faits dans l’affaire Adam sont tragiques. En novembre 2009, une petite fille de cinq ans est décédée cinq jours après avoir reçu un vaccin contre la H1N1. L’autopsie n’a pas permis de confirmer la cause du décès, mais il n’était pas exclu qu’il s’agissait du syndrome de la mort subite par arythmie (lorsque le cœur cesse de battre de façon soudaine et inexpliquée)3. En première instance, les demandeurs ont invoqué les témoignages d’un certain nombre de personnes, dont des experts en défense, pour affirmer que, puisque le vaccin ne peut être exclu comme cause du décès, les demandeurs ont réussi à prouver que le vaccin avait contribué au préjudice.
Le juge de première instance a rejeté cet argument, réaffirmant que les demandeurs doivent prouver à la fois la causalité générale (qu’un vaccin pourrait causer le préjudice allégué) et la causalité spécifique (que c’est ce qui s’est produit en l’espèce)4. Le tribunal a expliqué qu’une simple corrélation entre deux événements est insuffisante et que [traduction] « les tribunaux ont reconnu depuis longtemps qu’il est erroné de conclure qu’un vaccin a causé un problème médical précis simplement parce que le problème médical est survenu après l’administration du vaccin. Même si l’apparition d’un problème médical après la vaccination pourrait laisser croire que ce problème a été causé par le vaccin, cette hypothèse doit être testée et prouvée »5.
La Cour d’appel a maintenu la décision du juge de première instance, notamment en ce qui concerne la question du lien de causalité. En rejetant l’argument de causalité inédit des demandeurs, la Cour d’appel a observé que [traduction] « l’argument des appelants à savoir que le lien de causalité est prouvé dès qu’un risque relève du possible, peu importe qu’il soit faible ou même minuscule, constitue une interprétation erronée de principes juridiques établis concernant la causalité »6.
Les événements de l’affaire Adam ont eu lieu en 2009 et depuis, la question de l’indemnisation du préjudice causé par la vaccination a évolué. Toutefois, la preuve du lien de causalité demeure essentielle pour obtenir une indemnisation. Plus tôt cette année, le gouvernement fédéral a lancé le Programme de soutien aux victimes d’une vaccination (PSVV) sans égard à la faute. Ce programme pancanadien correspond au Programme d’indemnisation des victimes d’une vaccination mis en œuvre au Québec en 1988. En vertu du PSVV, les demandeurs ayant subi « une blessure grave et permanente »7 causée par un vaccin autorisé par Santé Canada et administré au Canada à compter du 8 décembre 2020 peuvent recevoir une indemnisation sans renoncer à leurs droits de poursuivre un litige8.
Même si les personnes qui font une demande en vertu de l’un de ces programmes n’ont pas besoin de prouver un manquement à la norme de diligence appropriée, une évaluation de la causalité est tout de même requise. Dans le cadre du PSVV, la causalité (c.-à-d. un lien probable entre la blessure et le vaccin) est évaluée par un comité de trois médecins qui appliquent des « protocoles d’évaluation de la causalité existants et reconnus à l’échelle internationale », y compris ceux instaurés par le Programme d’indemnisation des victimes d’une vaccination du Québec et l’Organisation mondiale de la santé9. Le fait que le programme québécois existe depuis plus de 30 ans suggère que la norme de causalité est rigoureuse. Des 287 demandes soumises depuis le début du programme, seulement 53 ont été acceptées et deux autres ont été acceptées après un appel sur la question de la causalité10.
Les actions collectives au Canada : à venir en 2022
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Vous pouvez lire le rapport complet sur les tendances en litige de 2021 en anglais ici.
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