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Mise en œuvre du budget 2025 : modifications proposées touchant les petites et moyennes institutions financières fédérales

Le gouvernement fédéral (le Gouvernement) a déposé un projet de loi intitulé Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 novembre 2025 (le Projet de loi budgétaire) sous forme d’avis de motion de voies et moyens, présenté pour première lecture le 18 novembre en tant que projet de loi C-15, seulement deux semaines après l’annonce du budget 2025 (un exploit impressionnant, car historiquement, le projet de loi d’exécution du budget est déposé environ six à huit semaines après l’annonce du budget). Nous tenons toutefois à souligner que la plupart des modifications prévues dans le cadre de l’examen du secteur financier de 2018, qui visaient à stimuler l’innovation, ne sont toujours pas en vigueur, et nous espérons que le Gouvernement continuera à accorder la priorité à leur mise en œuvre.

Dans notre bulletin intitulé « Le budget 2025 selon Torys : propositions pour les institutions financières fédérales de petite et moyenne taille » (Bulletin sur le budget), nous avons examiné certaines propositions générales présentées dans le budget 2025. Nous analysons ici les modifications proposées à la Loi sur les banques (Canada) (LB), à la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt (Canada) (LSFP) et à la Loi sur les sociétés d’assurances (Canada) (LSA) qui ont été incluses dans le Projet de loi budgétaire1.

Limites relatives aux placements, aux placements immobiliers, aux placements en capitaux propres et aux prêts commerciaux

Les restrictions légales relatives aux limites de placement, aux placements immobiliers et aux placements en capitaux propres prévues dans la LB, la LSFP et la LSA, ainsi que les restrictions relatives aux prêts commerciaux prévues dans la LSFP et la LSA (ainsi que la définition de « prêt commercial ») seront abrogées et remplacées par une nouvelle disposition qui permettra au surintendant des institutions financières Canada (le Surintendant) d’ordonner à une institution financière fédérale (une IF) de réduire la valeur totale de ses intérêts dans les placements immobiliers, les placements en capitaux propres (sauf lorsque l’IF a un investissement important) et, dans le cas des sociétés de fiducie et de prêt et des compagnies d’assurance, des prêts commerciaux. Le Surintendant ne sera autorisé à rendre une telle ordonnance que sur la base de considérations de prudence qu’il juge pertinentes. Il convient également de préciser qu’il peut exister une certaine ambiguïté quant à la définition de ce qui constitue un « prêt commercial » aux fins de l’exercice du pouvoir susmentionné du Surintendant, étant donné que cette définition aura été abrogée. Le Projet de loi budgétaire propose également d’abroger les dispositions de la LSA qui imposaient des limites au montant des titres de créance qu’une compagnie d’assurance pouvait émettre.

Il s’agit là d’un développement très positif, en particulier pour le secteur des assurances. La restriction relative aux prêts commerciaux (et sa définition très large) devenait particulièrement difficile à respecter pour un certain nombre de compagnies d’assurance, car bon nombre des options de placement désormais offertes aux entreprises sont nettement moins risquées que d’autres types de placements (par exemple, les placements de crédit privé considérés comme des prêts commerciaux peuvent générer des rendements ajustés au risque intéressants et une volatilité moindre) et devraient être encouragées plutôt que restreintes. Malheureusement, le Projet de loi budgétaire n’a pas non plus abordé la question du Règlement sur les investissements en infrastructure autorisés, dont la rédaction est trop restrictive, ni celle de la définition de l’« entité d’infrastructure admissible », dont nous avons parlé dans notre Bulletin sur le budget.

Exigence de flottant/caractérisation des grandes banques

Comme prévu, le Projet de loi budgétaire propose de modifier la LB, la LSFP et la LSA afin de hausser le seuil de capitaux propres pour l’exigence de 35 % en matière de détention publique, qui passerait de 2 G$ à 4 G$ (ce qui permettrait aux institutions financières de petite taille de prendre de l’expansion sans avoir à modifier leur structure de propriété). Toutefois, le seuil pour devenir une grande banque, qui est de 12 milliards de dollars depuis 2012, n’a pas été inclus dans les modifications proposées.

Notification et accès

Le Projet de loi budgétaire propose de modifier la LB, la LSFP et la LSA afin de permettre aux IF ayant fait appel au public et aux IF n’ayant pas fait appel au public, y compris les coopératives de crédit fédérales (CCF), d’utiliser la méthode de « notification et accès » (conforme aux règles liées au droit sur les valeurs mobilières) pour la remise des documents relatifs à une assemblée des actionnaires, des membres ou des titulaires de polices, selon le cas. Même si ces changements auraient dû être apportés depuis longtemps, les modifications proposées sont rédigées de manière restrictive : si la règle de notification et d’accès est remplacée ou complétée par des règles autorisant l’accès égal à la remise (ou toute autre règle qui pourrait être adoptée à l’avenir par les autorités de réglementation des valeurs mobilières), les modifications telles qu’elles sont rédigées ne permettraient pas l’utilisation de cet autre mécanisme. Nous aurions donc souhaité que les modifications soient rédigées de manière plus large afin de faire référence aux exigences applicables en matière de remise prévues par la législation sur les valeurs mobilières en vigueur à l’époque (qu’il s’agisse de la méthode de notification et d’accès, de l’accès équivalant à la remise ou d’autres règles qui pourraient être adoptées à l’avenir), ce qui éviterait le problème de la discordance persistante entre les lois sur les sociétés et les lois sur les valeurs mobilières.

Coopératives de crédit fédérales

Prorogation

Le Projet de loi budgétaire propose de modifier la LB afin de permettre à une CCF qui résulte d’une demande de prorogation (ou d’une prorogation et d’une fusion avec une CCF existante) de demander au ministre des Finances (le Ministre) une exemption transitoire en ce qui concerne l’application d’une ou de plusieurs dispositions du Cadre de protection des consommateurs de produits et services financiers de la LB pendant une période maximale de trois ans à compter de la date de délivrance de ses lettres patentes. Le Ministre devra être convaincu que la CCF qui résulte d’une telle demande dispose d’un plan acceptable de mise en conformité avec le Cadre au cours de cette période.

Les modifications proposées visent également à simplifier les fusions entre les CCF et les coopératives de crédit provinciales en supprimant l’obligation pour la CCF de demander l’approbation des membres (et des actionnaires, le cas échéant) par une résolution spéciale2 si les conditions suivantes sont remplies :

  • le total des actifs de la coopérative de crédit provinciale ne dépasse pas 25 % du total des actifs de la CCF; et
  • la fusion est approuvée par une résolution des administrateurs de la CCF et par des résolutions spéciales distinctes des membres et des actionnaires, le cas échéant, de la coopérative de crédit provinciale.

Les résolutions doivent également prévoir que 1) les règlements de la CCF issue de la fusion, y compris les règlements relatifs aux actions, seront les mêmes que ceux de la CCF avant la fusion, et que 2) le siège social de la CCF issue de la fusion sera situé dans la même province que le siège social de la CCF avant la fusion. L’un des problèmes qui pourrait malheureusement limiter l’utilisation de cette disposition est que la société issue de la fusion ne peut conserver aucune catégorie d’actions préexistante de la coopérative de crédit provinciale (autre que les parts sociales), étant donné que les règlements relatifs au capital social doivent être les mêmes que ceux de la coopérative de crédit existante. Dans la mesure où une CCF peut utiliser cette disposition, elle devra communiquer à tous ses membres qu’elle a conclu un accord de fusion et que la fusion est soumise à l’approbation des membres et des actionnaires (le cas échéant) de la coopérative de crédit provinciale, du ministre et des organismes de réglementation provinciaux compétents.

Opérations sur l’actif avec des coopératives de crédit provinciales

Le Projet de loi budgétaire proposait également des modifications visant à prévoir expressément l’achat par une CCF de la totalité ou de la quasi-totalité des éléments d’actif d’une coopérative de crédit provinciale, y compris que la contrepartie de l’acquisition des éléments d’actif puisse être constituée de numéraire ou de titres entièrement libérés de la CCF, ou en partie de numéraire et en partie de tels titres, ou de toute autre manière prévue dans la convention de vente. Les modifications proposées utilisent intentionnellement le terme « titres » plutôt que « actions », car le terme « action » est défini dans la LB comme n’incluant pas les parts sociales. Le Ministre sera autorisé à accorder à la CCF une exemption transitoire conforme à celle dont bénéficient actuellement les CCF qui ont poursuivi leurs activités en vertu de la LB (y compris la nouvelle exemption transitoire proposée en ce qui concerne les dispositions du Cadre de protection des consommateurs de produits et services financiers évoquées ci-dessus). Des modifications correspondantes sont également proposées à la Loi sur la Société d’assurance-dépôts du Canada afin d’accorder une exemption transitoire, à l’égard des dépôts de la coopérative de crédit provinciale, qui est conforme à l’exemption actuellement offerte en cas de prorogation. De plus, la LB sera modifiée afin de permettre à une CCF de nommer un ou plusieurs administrateurs de la coopérative de crédit provinciale pour occuper le poste d’administrateurs supplémentaires de la CCF pour un mandat expirant au plus tard à la clôture de la prochaine assemblée annuelle de la CCF.

Une approbation ministérielle sera nécessaire pour approuver la convention d’achat d’actifs, et le Ministre devra prendre une décision concernant la demande dans les 45 jours suivant la certification de réception de la demande par le Surintendant (cette réception sera fournie dès que le Surintendant aura estimé que la demande contient toutes les informations, tous les documents et toutes les preuves requis), mais le Ministre pourra prolonger ce délai de 45 jours supplémentaires s’il le juge approprié.

Cependant, aucun seuil d’importance relative n’a été inclus, ce qui aurait permis d’exempter les opérations de l’approbation ministérielle lorsque la valeur des actifs de la coopérative de crédit provinciale est inférieure à un certain seuil par rapport à la valeur des actifs de la CCF. Et bien que les modifications proposées semblent avoir été rédigées dans le but de faciliter le processus d’approbation ministérielle, dans la pratique (et d’après l’expérience acquise avec des dispositions similaires déjà en vigueur dans la LB), l’obtention d’une demande émise par le Surintendant pourrait prendre des mois; toutefois, compte tenu de la volonté manifeste du gouvernement de faciliter la croissance des CCF, nous sommes optimistes quant au fait que le Bureau du surintendant des institutions financières adoptera une approche mesurée pour examiner les demandes de cette nature en fonction de la taille relative de la coopérative de crédit provinciale par rapport à la CCF. Nous tenons également à souligner que, même si les modifications proposées à la LB constituent une avancée positive, il faudrait encore apporter les modifications correspondantes à la plupart des lois sur les coopératives de crédit provinciales afin de permettre à une coopérative de crédit provinciale de vendre ses actifs à une CCF3.

Crédit-bail de véhicules à moteur

Le Projet de loi budgétaire propose des modifications à la LB qui permettraient à une coopérative de crédit provinciale qui continue d’exercer ses activités en tant que CCF (ou qui fusionne avec une CCF) de se livrer aux activités suivantes, avec l’approbation du Ministre, si ces activités étaient exercées par la coopérative de crédit (ou sa filiale) avant sa prorogation : (a) le crédit-bail de véhicules à moteur au Canada dans le but de faire crédit à un client ou de financer l’acquisition d’un véhicule à moteur par un client; ou (b) accorder provisoirement la possession de véhicules à moteur à des clients au Canada dans un but autre que celui de financer l’acquisition d’un véhicule à moteur par un client. Le Projet de loi budgétaire prévoit également qu’une coopérative de crédit fédérale existante issue d’une prorogation auprès d’une coopérative de crédit provinciale peut également demander l’approbation ministérielle pour exercer ces activités si cette coopérative de crédit (ou sa filiale) exerçait ces activités la veille de sa prorogation.


  1. Nous (Torys) prévoyons publier d’autres bulletins sur d’autres aspects du Projet de loi budgétaire, notamment en ce qui concerne la Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs et la Loi sur les cryptomonnaies stables proposées.
  2. Toutefois, une assemblée sera nécessaire si au moins deux membres ayant le droit de vote ou au moins 1 % du nombre total de membres ayant le droit de vote à cette assemblée (le chiffre le plus élevé étant retenu) demandent, dans un délai prescrit, la tenue d’une assemblée pour voter sur la fusion.
  3. Nous nous attendions également à ce que la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) soit modifiée afin que l’opération soit considérée comme une fusion et soit exonérée d’impôt, mais il ne semble pas que le Projet de loi budgétaire comprenne des modifications de cette nature. En l’absence de ce changement, une opération sur l’actif pourrait ne pas être réalisable. 

Si vous souhaitez discuter ces enjeux et ces questions, veuillez contacter les auteurs.

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