Aperçu des risques de litige pour 2024

Protection des consommateurs au Québec – tendances en litige

Plusieurs modifications législatives et décisions judiciaires récentes au Québec touchent le droit de la consommation. Dans cet article, nous analysons le projet de loi no 29 et trois nouvelles décisions qui reflètent les tendances en matière de litige lié à la L.p.c. dans la province.

Modifications importantes apportées à la L.p.c. : projet de loi no 29

L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi no 29, Loi protégeant les consommateurs contre l’obsolescence programmée et favorisant la durabilité, la réparabilité et l’entretien. Cette Loi introduit de nombreuses modifications à la Loi sur la protection du consommateur (L.p.c.) afin :

  • d’interdire aux commerçants, ce qui inclut le fabricant, de faire le commerce d’un bien pour lequel l’obsolescence est « programmée » ainsi que l’utilisation de techniques qui rendraient plus difficile pour le consommateur l’entretien ou la réparation de son bien;
  • d’imposer une garantie de « bon fonctionnement du bien », dont la durée sera déterminée par règlement, couvrant les frais de réparation (pièces et main-d’œuvre) à certains biens neufs et aux voitures d’occasion;
  • d’obliger les commerçants à rendre disponibles les pièces requises pour l’entretien des biens visés par cette nouvelle garantie et pour leur réparation « pendant une durée raisonnable après la conclusion du contrat », ou à défaut, de remplacer le bien sans frais ou rembourser son prix d’achat;
  • d’introduire un régime de sanctions administratives pécuniaires administré par l’Office de la protection du consommateur (OPC), parallèlement aux sanctions pénales, pour toute contravention à la L.p.c.;
  • d’augmenter considérablement les amendes maximales dans le cadre de poursuites pénales, qui, dans certains cas, peuvent atteindre 125 000 $ par infraction, ou un montant équivalent à 5 % du chiffre d’affaires mondial du commerçant au cours de l’exercice précédent; et
  • de prévoir que tout administrateur, dirigeant, mandataire ou représentant d’une organisation contrevenant à la L.p.c. ou à ses règlements est présumé avoir aussi commis cette infraction, à moins de démontrer avoir fait preuve de diligence raisonnable.

Les nouvelles dispositions entreront en vigueur graduellement au cours des trois prochaines années.

La jurisprudence en matière de protection du consommateur

Ces derniers mois, les tribunaux québécois ont traité beaucoup de dossiers en droit de la consommation. Ci-après, nous examinons trois décisions récentes qui aident à préciser les droits des consommateurs (et les obligations des fournisseurs de biens et de services) en vertu de la L.p.c.

La valeur négative d’un véhicule de reprise ne constitue pas une violation de la L.p.c. : Banque de Montréal c. Chevrette, 2023 QCCA 516

La Cour d’appel accueille l’appel d’un jugement de la Cour supérieure autorisant une action collective au nom d’acquéreurs de nouveaux véhicules automobiles achetés au moyen de contrats de vente à tempérament dans lesquels se trouvait une valeur négative liée à la dette afférente à un véhicule donné en échange et incluse dans le financement du nouveau véhicule automobile. Les demandeurs prétendaient que la pratique d’inclure (et de refinancer) le capital négatif d’un véhicule repris en échange dans le prix du véhicule vendu contrevient à l’article 148 de la L.p.c.

La Cour d’appel a conclu que l’article 148 de la L.p.c n’interdit pas la reprise d’un bien à capital négatif tant que la valeur de celui-ci apparaît dans le contrat. Il découle nécessairement que le montant total à payer sera plus élevé que le seul prix annoncé du véhicule sans qu’il y ait violation à la loi.

Étant donné que les contrats de vente ont été conclus avec des concessionnaires indépendants, la Cour a également conclu qu’il n’y avait aucun lien de droit entre les demandeurs et les fabricants/distributeurs de nouveaux véhicules.

Plus difficile à prouver des fausses déclarations : Duguay c. General Motors du Canada ltée, 2023 QCCS 3223

La Cour supérieure rejette au mérite une action collective contre General Motors (GM) au nom de toutes les personnes qui ont acheté ou loué à long terme un véhicule de marque Chevrolet Volt. Dans cette action, le demandeur a allégué que GM aurait faussement représenté la Chevrolet Volt dans son matériel promotionnel comme une voiture qui permet, sans exception, d’effectuer des trajets quotidiens sans consommer d’essence ou émettre de gaz à effet de serre. Il a également affirmé que GM avait omis un fait important en passant sous silence le fait que la génératrice à essence s’active ainsi par temps froid malgré une batterie pleinement chargée.

La Cour a conclu ce qui suit :

  • Il n’y avait aucune preuve que les membres du groupe ont consulté les publicités contestées, et de toute façon, qu’un consommateur crédule et inexpérimenté qui aurait pris connaissance des publicités aurait su que l’autonomie électrique de la Chevrolet Volt pouvait être interrompue par temps froid;
  • GM n’a pas omis un fait important, d’abord car l’intervention de la génératrice à essence par temps froid n’est pas un élément déterminant dans le consentement du consommateur à la conclusion d’un contrat d’achat ou de location, et aussi, car le fait était mentionné dans les manuels du propriétaire et les mises en garde de la Chevrolet Volt;
  • Il n’existe pas une proximité suffisante entre les contenus des représentations qualifiées de fausses et trompeuses, et l’achat ou la location de la Chevrolet Volt par le demandeur.

La Cour a donc rejeté l’action en réduction de prix et dommages-intérêts compensatoires et punitifs.

Administrateur déclaré coupable d’avoir omis de fournir l’information prescrite par la L.p.c. : Directeur des poursuites criminelles et pénales c. St-Pierre, 2023 QCCS 3894

Administrateur unique d’une entreprise de prêts rapides, Nicholas St-Pierre est accusé d’avoir conclu avec des consommateurs des contrats de prêt d’argent qui ne comportaient pas toutes les mentions prescrites par la L.p.c. Il ne nie pas les allégations, mais avance que les contrats ne sont pas des contrats de prêt d’argent, mais bien des contrats de crédit variable. La Cour supérieure a entendu l’affaire en appel d’un jugement de la Cour du Québec ayant acquitté M. St-Pierre.

Elle conclut que les contrats sont bel et bien des contrats de prêt d’argent, car ils prévoient ce que suit : a) le consommateur fait, dès la signature, une demande d’avance d’argent d’un montant correspondant au plein montant du crédit consenti; b) le montant est versé aussitôt; c) le remboursement du capital, des intérêts et des frais est fait par versements périodiques préétablis; et d) pour obtenir un autre montant d’argent par la suite, le consommateur doit avoir remboursé au moins 60 % du montant prêté et doit formuler une demande de renouvellement que la compagnie se réserve le droit de refuser.

Ces caractéristiques sont incompatibles avec un contrat de crédit variable. La Cour supérieure infirme donc le jugement de la Cour du Québec, concluant que les contrats ne prévoyaient pas les mentions requises par la L.p.c.  M. St-Pierre est déclaré coupable de l’infraction puisqu’il avait connaissance de l’infraction au moment où elle a été commise.


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