Nouveau processus de traitement des plaintes relatives aux marchés publics au Québec
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Le 25 mai 2019 marque l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions concernant le traitement des plaintes dans le cadre de marchés publics au Québec. Ce processus supervisé par l’Autorité des marchés publics (« l’Autorité ») permettra d’uniformiser le traitement des plaintes relatives aux contrats publics au Québec et d’en assurer la cohérence.
Ce que vous devez savoir
- Instituée en décembre 2017, l’Autorité des marchés publics a pour mission de surveiller l’ensemble des marchés publics au Québec.
- Dès le 25 mai 2019, toute personne intéressée pourra déposer une plainte auprès de l’Autorité relativement à la décision d’un organisme public concernant un appel d’offres ou l’attribution de marchés publics.
- Le lancement du processus vise à assurer le traitement plus efficace, transparent et centralisé des enjeux et problèmes touchant les marchés publics.
- Le traitement des plaintes est assujetti à des délais stricts et exigera que les parties lésées agissent rapidement afin d’obtenir réparation auprès de l’Autorité.
- L’Autorité a de vastes pouvoirs de réparation et peut:
- ordonner à l’organisme public de modifier ses documents d’appel d’offres ou d’annuler l’appel d’offres public;
- ordonner à l’organisme public de ne pas donner suite à son intention de conclure de gré à gré un contrat public;
- ordonner à l’organisme public de recourir à un vérificateur de processus indépendant;
- désigner une personne indépendante pour agir à titre de membre d’un comité de sélection;
- suspendre l’exécution d’un contrat public ou résilier celui-ci.
- Compte tenu du lancement de ce nouveau processus, les entreprises qui participent aux processus relatifs aux marchés publics doivent connaître leurs droits et les délais applicables pour déposer une plainte et les entités adjudicatrices assujetties au nouveau régime doivent s’assurer que leurs pratiques d’approvisionnement sont conformes à toutes les exigences juridiques.
À propos de l’Autorité des marchés publics
L’Autorité des marchés publics a été instituée lors de l’adoption du projet de loi 108, Loi favorisant la surveillance des contrats des organismes publics et instituant l’Autorité des marchés publics, le 1er décembre 2017. Ce projet de loi était la réponse de l’Assemblée nationale du Québec à la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction (CEIC), mieux connue sous le nom de Commission Charbonneau. La première recommandation de la Commission concernait la création d’une instance nationale d’encadrement des marchés publics qui veillerait à la transparence et à l’intégrité des processus au Québec.
L’Autorité a pour mission de superviser l’ensemble des marchés publics au Québec, notamment les processus d’adjudication et d’attribution de ces contrats, et d’assurer la conformité de ceux-ci avec les dispositions d’une autre loi d’importance, soit la Loi sur les contrats des organismes publics (la Loi sur les contrats). De plus, l’AMP a créé de nouveaux recours administratifs pour les fournisseurs qui participent aux processus d’approvisionnement et joue un rôle clé dans la surveillance continue des contrats publics et de l’exécution de ceux-ci.
Déroulement et fonctionnement du processus de traitement des plaintes
Qui peut se prévaloir des nouvelles dispositions? Pour quels types de contrats?
Toute personne ou société de personnes intéressée, ainsi que la personne qui la représente, peut porter plainte à l’Autorité relativement à un processus d’adjudication ou d’attribution d’un contrat public1. L’Autorité peut, de sa propre initiative ou sur demande du président du Conseil du trésor ou du ministre responsable des affaires municipales, examiner tout contrat public2.
L’Autorité est responsable d’un vaste éventail de contrats et l’envergure de cette responsabilité traduit la volonté d’accorder à cette organisation toute la latitude requise pour accomplir sa mission3. La Loi sur les contrats définit les contrats assujettis à la surveillance de l’Autorité4, notamment les contrats d’approvisionnement, de services et de travaux de construction qui comportent une dépense de fonds publics, ainsi que les contrats de partenariat public-privé. Il importe de mentionner que l’Autorité exerce également ses pouvoirs à l’égard des contrats conclus par les hôpitaux, les écoles, les universités et les organismes municipaux.
Les marchés publics sont généralement conclus dans le cadre de l’un des deux processus suivants : l’adjudication ou l’attribution.
Lors du processus d’adjudication, l’organisme public concerné lance un appel d’offres dans le système électronique d’appel d’offres et attribue le contrat en fonction de la soumission la plus basse qui satisfait tous les critères énoncés dans les documents d’appel d’offres5.
Dans le cadre d’un processus d’attribution, l’organisme public ne lance aucun appel d’offres; il conclut plutôt un contrat de gré à gré avec le contractant. Les organismes publics ne peuvent normalement pas recourir à un marché non concurrentiel (à fournisseur unique), sauf dans des circonstances précises, par exemple lorsque la sécurité des personnes ou des biens est en cause en situation d’urgence, lorsqu’un seul contractant est possible ou lorsqu’ils estiment qu’il sera possible de démontrer qu’un appel d’offres public ne servirait pas l’intérêt public, compte tenu de l’objet du contrat6. Dans ces cas, l’organisme public doit publier un avis d’intention au moins quinze jours avant de conclure un contrat de gré à gré. Cet avis indique la nature du marché public, le nom du contractant, les motifs invoqués par l’organisme public pour conclure le contrat de gré à gré, ainsi que d’autres détails7. Une partie intéressée peut manifester son intérêt à réaliser le contrat auprès de l’organisme public ayant publié l’avis d’intention. L’organisme public doit transmettre à cette partie, par voie électronique, sa décision de maintenir ou non son intention de conclure le contrat de gré à gré au moins sept jours avant la date prévue de conclusion du contrat8.
Quelles plaintes sont traitées dans le cadre de ce nouveau processus?
La Loi sur l’Autorité des marchés publics (Loi sur l’AMP) prévoit trois motifs de plainte principaux :
- Dans le contexte d’un processus d’adjudication d’un contrat public, lorsque les documents d’appel d’offres public prévoient des conditions qui n’assurent pas un traitement intègre et équitable des concurrents, ne permettent pas à des concurrents d’y participer bien qu’ils soient qualifiés pour répondre aux besoins exprimés ou ne sont pas autrement conformes au cadre normatif9;
- Dans le contexte d’un processus d’attribution d’un contrat public, lorsqu’une partie intéressée a manifesté son intérêt à réaliser le contrat auprès de l’organisme public ayant publié l’avis d’intention requis par la loi et qu’elle est en désaccord avec le maintien de la décision de l’organisme public10;
- Dans le contexte d’un processus d’attribution d’un contrat public, lorsque l’avis d’intention n’a pas été publié dans le système électronique d’appel d’offres11.
En outre, toute personne peut communiquer à l’Autorité, sous le couvert de l’anonymat, des renseignements relatifs à l’appel d’offres et à l’exécution d’un contrat public lorsqu’il apparaît que l’organisme public n’est pas en conformité avec le cadre normatif.
Quels sont les pouvoirs de l’Autorité?
L’Autorité exerce de vastes pouvoirs d’enquête et de réparation lui permettant d’intervenir de diverses manières lorsque des marchés publics sont concernés. Au terme d’une vérification ou d’une enquête, l’Autorité peut :
- ordonner la modification des documents d’appel d’offres;
- ordonner l’annulation d’un appel d’offres public;
- ordonner à l’organisme public de ne pas donner suite à son intention de conclure de gré à gré un contrat public;
- ordonner à l’organisme public de recourir à un vérificateur de processus indépendant;
- désigner une personne indépendante pour agir à titre de membre d’un comité de sélection;
- examiner et approuver la composition du comité de sélection;
- suspendre l’exécution d’un contrat public ou résilier celui-ci12.
En vertu de ses pouvoirs, l’Autorité peut également s’assurer du respect des ordonnances qu’elle a rendues, notamment en exigeant la transmission des renseignements nécessaires à l’exercice de ses fonctions ou la communication des mesures prises pour donner suite à ses recommandations13.
Comment un fournisseur prépare-t-il sa plainte?
Le processus de traitement des plaintes est administré à l’aide d’un formulaire électronique qui sera accessible à partir du site Web de l’Autorité sous peu. Comme les délais pour le dépôt des plaintes sont courts, il faut agir rapidement et de façon diligente.
Que sa plainte concerne un processus d’adjudication ou d’attribution, toute personne intéressée lésée doit d’abord signaler son désaccord à l’organisme public concerné. Cette étape est nécessaire avant de recourir au processus de traitement des plaintes de l’Autorité14.
En cas de désaccord avec la décision de l’organisme public, le plaignant doit transmettre sa plainte à l’Autorité au plus tard trois jours suivant la réception de la décision contestée15. Ces délais sont ajustés lorsque l’organisme public ne rend pas de décision avant la date de clôture du processus d’appel d’offres ou avant la date prévue de conclusion du contrat pour les contrats de gré à gré.
Il importe de noter que l’Autorité rejette la plainte lorsque le plaignant exerce ou a exercé un recours judiciaire16.
Conclusion
Ces dispositions constituent un nouvel outil important pour les participants aux processus des marchés publics. Elles visent le traitement uniforme des plaintes à l’échelle des secteurs d’activité et assurent la cohérence du processus au sein de nombreux organismes publics du Québec. Les entreprises devraient les consulter systématiquement lorsqu’elles participent à des processus d’appel d’offres et les organismes publics devraient s’assurer que leurs pratiques d’approvisionnement sont conformes aux exigences de la Loi sur les contrats.
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1 Loi sur l’Autorité des marchés publics (Loi sur l’AMP), c. A-33.2.1, a. 37 à 43.
2 Loi sur l’AMP, a. 53.
3 Québec, Assemblée nationale, Journal des débats, 41e législature, 1re session, vol. 44, n° 212 (23 novembre 2016), 12952 (Carlos Laitão).
4 Loi sur les contrats, a. 3 et 4.
5 Loi sur les contrats, a. 11.
6 Loi sur les contrats, a. 13.
7 Loi sur les contrats, a. 13.1.
8 Loi sur les contrats, a. 13.2.
9 Loi sur l’AMP, a. 37 et 39. La notion de « cadre normatif » désigne les règles qui s’appliquent à un organisme particulier dans les processus des marchés au-delà de celles qui sont énumérées.
10 Loi sur l’AMP, a. 38 et 39.
11 Loi sur l’AMP, a. 42.
12 Loi sur l’AMP, a. 29.
13 Loi sur l’AMP, a. 34 et 35.
14 Loi sur l’AMP, paragr. 46(5).
15 Loi sur l’AMP, a. 37 et 38.
16 Loi sur l’AMP, paragr. 46(7).
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