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Nous avons récemment assisté à des développements législatifs importants en ce qui a trait aux clauses de non-concurrence visant les employés dans les États de New York et de la Floride. Ces développements sont remarquables, en partie parce que les deux États concernés, historiquement favorables aux employeurs, ont adopté des approches étonnamment différentes en ce qui concerne la portée des clauses de non-concurrence exécutoires.
En janvier 2025, l’Assemblée législative de l’État de New York a déposé le projet de loi S4641 du Sénat. Celui-ci vise à interdire la quasi-totalité des ententes de non-concurrence dans le domaine du travail, à l’exception des ententes de non-concurrence conclues avec certaines personnes fortement rémunérées. Un projet de loi similaire avait été adopté par les deux chambres de l’Assemblée législative new-yorkaise en 2023, mais le gouverneur Hochul y avait opposé son veto, car il souhaitait que l’interdiction ne s’applique pas aux ententes de non-concurrence conclues avec des personnes fortement rémunérées ni à celles conclues dans le cadre de la vente d’une entreprise. Le projet de loi actuel répond à ces deux préoccupations en autorisant de manière générale un employeur à conclure une entente de non-concurrence avec une « personne hautement rémunérée » (définie comme ayant reçu une rémunération moyenne en espèces d’au moins 500 000 dollars au cours des trois années précédentes) et en autorisant les ententes de non-concurrence conclues dans le cadre de la vente d’une entreprise.
Si elle est adoptée, l’interdiction des clauses de non-concurrence ne s’appliquera pas uniquement aux employés, mais également à toutes les « personnes physiques couvertes », définies comme « toute personne, autre qu’une personne hautement rémunérée, qui, dans le cadre d’un contrat de travail ou non, effectue ou a effectué du travail pour une autre personne, ou lui fournit ou lui a fourni des services, dans des conditions la mettant dans une position de dépendance économique par rapport à cette autre personne et dans l’obligation d’effectuer des tâches pour elle ». Le projet de loi précise également que d’autres clauses restrictives continueront d’être autorisées dans le domaine du travail, comme les clauses de non-concurrence limitées à la durée de l’emploi, les clauses de non-divulgation des secrets commerciaux, les ententes de confidentialité ainsi que les clauses de non-sollicitation des clients. Fait notable, le projet de loi ne fait pas mention des clauses interdisant la sollicitation des employés.
Dans sa mouture actuelle, le projet de loi créerait une cause d’action privée permettant à toute personne d’intenter une action civile contre un employeur qui enfreint la nouvelle loi. La réparation pourrait comprendre une injonction contre l’application de la clause de non-concurrence, des dommages-intérêts extrajudiciaires (d’un maximum de 10 000 $), des sommes pour perte de rémunération, des dommages-intérêts compensatoires et/ou le remboursement des honoraires raisonnables d’avocat et des frais.
À la date de la présente publication, le projet de loi n’a pas encore été adopté par l’Assemblée de l’État de New York ni été déposé sur le bureau du gouverneur Hochul. S’il est adopté, toute entente de non-concurrence, nouvelle ou modifiée, prenant effet après sa date d’entrée en vigueur (30 jours après sa ratification par le gouverneur) serait annulée et inexécutoire. Toutefois, l’interdiction ne serait pas appliquée rétroactivement aux ententes existantes.
Plus tôt ce mois-ci, le gouverneur de la Floride, M. DeSantis, a promulgué la loi sur les contrats favorisant les occasions, l’investissement, la confidentialité et la croissance économique (Contracts Honoring Opportunity, Investment, Confidentiality and Economic Growth Act, ou CHOICE Act). Cette nouvelle loi, qui est entrée en vigueur rétroactivement le 1er juillet 2025, renforce considérablement les droits des employeurs quant aux ententes de non-concurrence et de dispense de travail avec salaire. Plus précisément, elle permet aux employeurs de lier des « employés couverts » à des « ententes de non-concurrence couvertes » d’une durée maximale de quatre ans au sein d’une région géographique définie. Ces termes sont définis de manière générale : un « employé couvert » s’entend d’un employé ou un entrepreneur individuel dont le salaire est le double du salaire annuel moyen du comté de la Floride dans lequel se situe le lieu d’affaires principal de l’employeur ou, si ce lieu n’est pas situé en Floride, du comté de la Floride dans lequel l’employé couvert réside, et une « entente de non-concurrence couverte » s’entend d’une entente entre un employé couvert et son employeur en vertu de laquelle « l’employé couvert accepte de n’assumer aucun rôle auprès d’une autre entreprise, entité ou personne a) où l’employé couvert fournirait des services semblables à ceux fournis à l’employeur couvert au cours des trois années précédant la période de non-concurrence, ou b) où l’employé couvert est raisonnablement susceptible d’utiliser les renseignements confidentiels ou les relations avec la clientèle de l’employeur ». Précisons que, contrairement à l’obligation de rémunération prévue pour les ententes de dispense de travail avec rémunération décrites ci-dessous, il n’existe aucune obligation expresse de paiement pour la période de non-concurrence.
De même, en vertu de la CHOICE Act, les employeurs peuvent exiger que les employés couverts les avisent jusqu’à quatre ans d’avance avant de mettre fin à leur relation d’emploi. La loi énumère plusieurs conditions pour que ces ententes de dispense de travail avec rémunération soient contraignantes : i) l’entente et le consentement de l’employé doivent être écrits; ii) l’employé couvert ne peut pas être tenu de fournir des services à l’employeur après les 90 premiers jours de la période de préavis; iii) une fois les 90 premiers jours écoulés, l’employé couvert peut travailler pour d’autres employeurs avec l’autorisation de son employeur et peut exercer des activités non professionnelles à tout moment pendant la période de dispense de travail; et iv) l’employeur est tenu de continuer à verser le même salaire et à offrir les mêmes avantages à l’employé couvert pendant la période de préavis, mais n’est pas tenu de lui fournir une rémunération incitative discrétionnaire ou des avantages supplémentaires.
La CHOICE Act impose aux tribunaux de faire respecter ces obligations de non-concurrence et de dispense de travail avec rémunération, sauf pour des raisons très précises. En outre, la loi précise qu’une injonction n’est pas un recours exclusif et qu’un employeur peut réduire le salaire ou les avantages de l’employé couvert ou prendre d’autres mesures appropriées au cours de la période de non-concurrence ou de dispense de travail avec rémunération si l’employé couvert commet une faute grave.
Il convient de s’attendre à ce que l’adoption en Floride de la CHOICE Act conduise d’autres États (notamment New York et, comme c’est actuellement le cas, la Californie) à appliquer leurs propres lois à tous les contrats régissant les employés situés dans leurs juridictions et à invalider toute disposition relative au choix du droit applicable ou au choix d’une instance qui appelle à l’application de lois de non-concurrence contraires aux leurs. En l’absence d’une loi fédérale sur la non-concurrence ou d’une nouvelle interdiction semblable à celle déposée par la Commission fédérale du commerce des États-Unis l’année dernière (qui n’est jamais entrée en vigueur), nous pouvons nous attendre à ce que la tendance à la polarisation des approches des assemblées législatives des États quant aux clauses de non-concurrence persiste, ce qui forcerait les employeurs à devoir démêler l’écheveau des lois de plus en plus divergentes sur les clauses restrictives de non-concurrence dans l’ensemble des États-Unis.
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