T1 | Revue Trimestrielle de TorysHiver 2022

Litiges en milieu de travail : tendances à surveiller en 2022

Auteurs

La dernière année a été riche en développements juridiques en droit de l’emploi qui auront des répercussions importantes sur le milieu de travail. En ce début de 2022, nous analysons trois tendances en matière de litige lié au droit de l’emploi qui seront importantes pour les entreprises.

1. Examen judiciaire des politiques de vaccination obligatoire

La pandémie de COVID-19 et la distribution massive de vaccins sécuritaires et efficaces ont eu des répercussions importantes sur le milieu de travail en 2021 et nous croyons que les enjeux liés à la pandémie continueront à s’y imposer en 2022.

Il reste à voir quelles mesures le droit, tant public que privé, imposera aux employeurs pour régler ces questions.

Dans le but de réduire les risques liés à la COVID-19, plusieurs employeurs ont mis en place des politiques exigeant que leurs employés soient entièrement vaccinés pour pouvoir accéder à leur milieu de travail. Ces politiques ont fait l’objet d’un certain nombre d’examens arbitraux et judiciaires en 2021. Ainsi, dans l’affaire Blake v. University Health Network, la Cour supérieure de l’Ontario a statué que l’arbitrage constitue un forum approprié pour les différends sur les politiques de vaccination entre des parties liées par une entente de négociation collective1. Même si aucun tribunal canadien n’a encore examiné le bien-fondé des politiques de vaccination obligatoire, les tribunaux d’arbitrage sont généralement d’avis que celles-ci sont exécutoires. 

Selon nous, ces questions continueront à être étudiées en 2022, possiblement plus en profondeur, particulièrement si les gouvernements fédéral et provinciaux prennent des mesures concernant la vaccination obligatoire (notamment des changements concernant l’obligation de recevoir la dose de rappel du vaccin contre la COVID-19).

2. Loi de 2021 visant à œuvrer pour les travailleurs de l’Ontario

Le 30 novembre, le gouvernement de l’Ontario a adopté la Loi de 2021 visant à œuvrer pour les travailleurs qui amène des changements importants à deux aspects des relations de travail.

  • D’abord, la Loi interdit expressément aux employeurs d’ajouter des clauses de non-concurrence aux contrats de travail, sauf s’il s’agit de cadres supérieurs ou s’il s’agit de la vente de l’entreprise. La Loi permet l’utilisation d’ententes de non-sollicitation et de confidentialité. En 2022, les employeurs devront être à l’affût de précisions législatives et des interprétations judiciaires quant à la portée de ces changements législatifs.
  • En second lieu, la Loi impose aux employés employant 25 personnes ou plus l’obligation de mettre en place une politique de « déconnexion du travail ». La déconnexion du travail est définie comme le fait d’être en inactivité, ce qui comprend le fait de « ne pas effectuer des communications liées au travail, notamment les courriels, les appels téléphoniques, les appels vidéo ou l’envoi ou la lecture d’autres messages ». La Loi ne prévoit pas d’obligations importantes quant à la politique elle-même; le contenu de celle-ci est laissé à la discrétion de l’employeur. En 2022, les employeurs devront surveiller la publication de meilleures pratiques et de lignes directrices pour les aider à établir leurs politiques de déconnexion du travail.

3. Équité, diversité et inclusion en milieu de travail

L’interprétation judiciaire des obligations des employeurs de créer un milieu de travail suffisamment équitable, diversifié et inclusif – un enjeu important par le passé – sera ramenée à l’avant-plan en 2022. Les questions d’équité, de diversité et d’inclusion ont été expressément soulevées dans plusieurs affaires récentes :

  • Dans l’affaire Thompson v. Canada, un groupe d’employés noirs de la fonction publique du Canada a déposé une demande de recours collectif devant la Cour fédérale concernant la discrimination systémique en milieu de travail. Le recours, entrepris en 2021, allègue que le Canada est responsable envers ses employés noirs anciens et actuels pour n’avoir pas mis un terme à la discrimination, aggravant ainsi le désavantage subi par les travailleurs noirs2.
  • Dans l’affaire Lewis v. WestJet Airlines Ltd3, la Cour suprême de la Colombie-Britannique devait décider si les recours en discrimination fondée sur le sexe ou la race relèvent du droit privé et de la Class Proceedings Act ou si elles devraient plutôt être entendues par des organismes administratifs en matière de droits de la personne. En l’espèce, des agentes de bord ont déposé une demande de recours collectif contre leur employeur, alléguant que celui-ci contrevenait à leur contrat de travail en les exposant à un harcèlement sexuel systémique. Leur recours a été rejeté car, selon le tribunal, l’allégation portait principalement sur le harcèlement fondé sur le sexe, et relevait donc du Tribunal canadien des droits de la personne.
  • Dans l’arrêt Fraser c. Canada (Procureur général), la Cour suprême du Canada a examiné une question semblable. Dans cette affaire, le régime de retraite de la GRC empêchait les employés de racheter du service ouvrant droit à pension pour la période où ils participaient au programme de partage de poste de la GRC4. La Cour a conclu que cette disposition en apparence neutre constituait de la discrimination contre les femmes, qui étaient les principales participantes au programme de partage de poste, violant ainsi le droit à l’égalité garanti par le paragraphe 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les employeurs et les promoteurs de régime de retraite devraient surveiller la façon dont les juridictions inférieures interprètent la portée de l’arrêt Fraser.

De toute évidence, les tribunaux prêtent attention aux façons dont les politiques et les mesures liées au milieu de travail peuvent accentuer les enjeux d’équité, de diversité et d’inclusion préexistants. Il reste à voir quelles mesures le droit, tant public que privé, imposera aux employeurs pour régler ces questions. Nous nous attendons à ce que les tribunaux canadiens continuent à se pencher sur la nature de ces obligations en 2022.


  1. Blake v. University Health Network, 2021 ONSC 7139.
  2. Thompson v. Canada (AG) (se reporter à la déclaration).
  3. Lewis v. WestJet Airlines Ltd., 2021 BCSC 228.
  4. Fraser c. Canada (Procureur général), 2020 SCC 28.

Si vous souhaitez discuter ces enjeux et ces questions, veuillez contacter les auteurs.

Cette publication se veut une discussion générale concernant certains développements juridiques ou de nature connexe et ne doit pas être interprétée comme étant un conseil juridique. Si vous avez besoin de conseils juridiques, c'est avec plaisir que nous discuterons les questions soulevées dans cette communication avec vous, dans le cadre de votre situation particulière.

Pour obtenir la permission de reproduire l’une de nos publications, veuillez communiquer avec Janelle Weed.

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